« J’ai déployé mon zèle pour l’Eternel… et ils cherchent à m’ôter la vie » (1 Rois 19/9)

 

Dans cette caverne, Elie vécu un véritable tournant pour son ministère. Là, seul et isolé après 40 jours de marche dans le désert, il rencontra le Seigneur, et ce fut l’occasion pour lui de faire le bilan, une sorte de mise au point sur son parcours si chaotique.

Cette caverne fut le lieu de tous les doutes. Dieu pensait-il encore à lui ? Était-il toujours à ses côtés ? Et l’entendait-il encore ? Et au fond, tout cela était-il bien réel ?

Cette sombre grotte fut aussi un lieu où il a exprimé son amertume. « Après tout ce que j’ai fait, voila comment les gens me traitent ! Ils cherchent à me faire mourir ! ». Honnête mais désemparé, le serviteur de Dieu avouera à Dieu son « ras-le-bol », son exaspération, et cela au travers d’une simple phrase : « J’ai déployé mon zèle pour l’Eternel… et ils cherchent à m’ôter la vie » (1 Rois 19/9). Le prophète avait tout donné, tout sacrifié, tout accepté pour le ministère, pour la cause de Dieu. Et qu’avait-il eu en retour ? Le mépris, le rejet, la solitude. Tout ça pour quoi ? Où était Dieu ?…« Et pourquoi les as-tu laissés faire Seigneur ? » Non, c’était bien trop injuste. La version Semeur traduit ces propos en ces termes : « J’ai ardemment défendu la cause de l’Eternel, et les voila qui cherchent à me prendre la vie ! » La blessure était d’ailleurs si profonde qu’il redira cela à plusieurs reprises (Verset 15).

Bref, la « pilule » ne passait pas, la peine et la douleur lui étaient restées en travers de la gorge, et son zèle avait disparu. L’envie de servir n’était plus, le désir de proclamer la parole de Dieu s’était évanoui, la flamme s’était éteinte. Il était comme mort, plus bon à rien. Mais la voilà la bonne nouvelle : cette nuit-là, Dieu visita un « bon à rien », un homme cassé, un prophète qui n’était plus que l’ombre de lui-même. Et mieux encore il daigna lui adresser la parole : « Que fais-tu ici ? ». Et la réponse fut comme un exutoire. Elie videra son sac au pied du Maitre, et ce dernier l’écoutera patiemment, avec douceur et empathie. Et puis Dieu répondra. Mais cette fois-ci, pas de longs discours, pas de belles tirades, pas de solutions à l’emporte-pièce, non, une réponse des plus laconique : « Va et reprend ton chemin dans le désert ».Et chose étonnante, cette parole suffira pour rallumer la flamme. Aucune explication, aucun détail, juste un ordre… et quel ordre ! Dieu le renvoyait dans le désert. Certains diront que cette nuit-là, le Seigneur manqua passablement de tact, de délicatesse, de psychologie. Si nous avions été à sa place nous l’aurions consolé, ménagé, soigné, chouchouté. Nous lui aurions concocté un lieu de repos, proposé un temps de convalescence. Mais ce n’est pas ainsi que Dieu procéda. Pourquoi ? Et bien parce que sa simple présence allait suffire pour panser les blessures d’Elie. La simple Parole de Dieu, vivifiante et puissante, suffira à lui redonner force, courage, vigueur, … et envie.

Parce que, disons-le, le prophète n’avait plus envie, ou plutôt, la seule envie qui le hantait, c’était celle de mourir ! D’ailleurs, il se pensait peut-être déjà mort. Mort spirituellement, mort socialement. L’onction était partie, et ses amis aussi d’ailleurs. « Je suis resté moi seul ! » dira-t-il.

Alors oui, Dieu avait du travail avec ce serviteur défait, la tâche s’annonçait ardue, difficile, voire même impossible. Fort heureusement le Seigneur n’est pas de ceux qui jettent l’éponge, au contraire, il épongera les larmes de son serviteur.

Et nous, hommes de Dieu, n’avons-nous pas, nous aussi, des larmes à éponger ? Des larmes cachées, intériorisées, dissimulées, ravalées. A force de combats, de trahisons et de déceptions, notre couche n’a-t-elle pas été parfois « baignée de larmes » comme David ? (Psaumes 6/6)

Et bien les larmes d’Elie, Dieu les sécha dans cette caverne froide et obscure, dans ce lieu si inconfortable, dans le confinement. C’est d’ailleurs souvent dans des lieux confinés que Dieu séchera les larmes de ses serviteurs… J’en veux pour preuve la consolation dont Jean fut l’objet alors qu’il était, lui aussi, confiné sur l’ile de Patmos. « Ne pleure pas » lui dira le Seigneur car « Voici, le lion de la tribu de Juda, le rejeton de David, a vaincu ». (Apo. 5/5)

Profitons donc de ce temps de confinement pour laisser Dieu agir en nous.

 

Thierry CHAMBEYRON
Pasteur principal à l’AdD de Décines

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